Lettre de campagne n°4 : Pour L’Avenir en commun, contre les soumissions à l’ordre libéral et à l’ordre nationaliste, structurer la France Insoumise
Au terme du premier tour de l’élection présidentielle, l’histoire semble se répéter. A deux reprises, en 1997-2002 et en 2012-2017, l’exercice du pouvoir par le Parti socialiste a conduit à des succès électoraux du Front national. Loin d’être un barrage à la montée de l’extrême-droite, le PS apparaît comme son meilleur tremplin.
Encore une fois, le Parti socialiste a mené un double jeu, destructeur des espérances d’une alternative politique et sociale. Pour se maintenir au pouvoir, il a dénaturé le système démocratique en utilisant la menace du Front national pour transformer l’élection présidentielle en une élection à un tour. Depuis 30 ans, le PS ne peut se maintenir au pouvoir qu’en suscitant une progression du FN, afin d’affaiblir la droite républicaine et de désamorcer toute critique de gauche. C’était la stratégie de Hollande, qu’il n’a pu mener à son terme, mais que reprennent Macron et tous les vieux politiciens qui se sont ralliés.
Une partie importante de son électorat (48 %) s’est reportée sur Macron, assurant la défaite de Jean-Luc Mélenchon. Ce ralliement témoigne de l’indifférence des couches sociales supérieures aux trois crises – institutionnelle, sociale et écologique – qui fracturent l’Europe, fragilisent les sociétés et alimentent la montée de l’extrême-droite.
Mais l’histoire ne se répète pas totalement. Les appels au « front républicain » font l’impasse sur une réalité politique : le Front national sort renforcé du mandat de Hollande et de sa politique mise en œuvre par Macron. Entre 2012 et 2017, il a ainsi gagné 1 204 603 voix. Plus grave, une fraction de cet électorat est désormais radicalisée et risque de devenir une menace directe pour la République.
Plus encore qu’en 2002, tout le système politique et institutionnel de la Ve République est en crise. Les partis traditionnels se sont discrédités: le PS a sombré,(- 8 millions de voix), LR s’est effondré(– 2 millions). Macron ne peut espérer de majorité parlementaire qu’au prix de négociations avec les débris du Parti socialiste, d’ailleurs déjà engagées. Ce rapprochement implique également une alliance électorale avec la droite démocrate-chrétienne et avec la droite la plus libérale. Loin d’apporter une clarification politique, la victoire de Macron ajoute à la confusion. Son élection renforcera le Front national et débouchera sur des politiques économiques et sociales toujours plus libérales, sur une soumission confirmée aux orientations austéritaires de l’Union européenne.
La présence de Macron et du Front national au deuxième tour résulte aussi de la campagne de désinformation menée par certains médias – notamment ceux de service public – contre La France insoumise et la candidature de Jean-Luc Mélenchon, et des prises de position ignobles de certains responsables politiques dont Hollande et ses premiers ministres.
Malgré la déception, La France Insoumise s’est imposée comme une force incontournable.
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Elle a élargi son audience approchant les 20 % des suffrages. Plus de 7 millions d’électrices et d’électeurs ont voté en faveur de notre candidat, Jean-Luc Mélenchon gagnant 2 989277 de voix par rapport à 2012 et arrivant en tête dans 67 circonscriptions.
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Elle a trouvé de nouveaux appuis dans les milieux populaires (ouvriers : 22 %; employés : 23%). Dans le bassin stéphanois, à Saint-Etienne (24 %) et Firminy (26%) ; dans la banlieue lyonnaise : Givors (36 %), Saint-Fons (35 %), Vénissieux (35 %) et Vaux-en-Velin (38 %) ; dans le Doubs à Bethoncourt (29 %) ; dans l’Oise, à Creil (34 %) et Montataire (39 %) ; dans le Cher, à Vierzon (27 %) ; en banlieue parisienne, à Gennevilliers (47%), aux Mureaux (36 %), à Trappes (32 %) ; autour de Rouen, à Sotteville (21 %), à Saint-Etienne du Rouvray (36 %) et Elbeuf (26 %) ; dans le Nord, à Roubaix (35 %) et Tourcoing (27 %) ; à Paris dans les 19e (30 %) et 20e (31 %) arrondissements.
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Elle a su également attirer les classes moyennes (20 %) de nombreuses grandes villes françaises : elle est arrivée en tête à Lille (29 %), Grenoble (28 %), Marseille (24 %), Avignon (28 %), Montpellier (31%), Toulouse (29 %), posant les bases d’une nouvelle alliance de transformation sociale et politique.
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Elle a trouvé enfin un formidable écho au sein de la jeunesse rassemblant le plus grand nombre de suffrages exprimés chez les 18-24 ans (avec 30 %, loin devant le Front national et Macron) et les 24-35 ans (avec 24 %, à égalité avec le Front national).
En offrant une véritable alternative politique et sociale, La France Insoumise a contribué ainsi à limiter la progression du bloc néo-fasciste.
Ces résultats démontrent la pertinence de la stratégie de La France Insoumise qui est devenue en l’espace d’un an une force capable de conquérir le pouvoir pour transformer profondément la société.
Nous refusons de tomber dans la fausse alternative entre les deux soumissions, l’une au libéralisme, l’autre au nationalisme. Le Front national reste notre ennemi politique ; nous continuerons à le combattre partout et par tous les moyens. Pour autant, nous refusons de tomber dans le piège d’un « front républicain » qui ne ferait que relégitimer les libéraux de droite comme de gauche.
Nous devons à présent poursuivre la structuration de La France Insoumise. Les élections législatives qui s’annoncent doivent être l’occasion de gagner une expression parlementaire à la mesure du succès de la candidature de Jean-Luc Mélenchon et de l’espoir que L’Avenir en commun a soulevé. La campagne doit être nationale et refuser toute forme d’accord d’appareils reconduisant les confusions et les collusions avec le Parti socialiste et tous ceux qui font cause commune avec lui.
Groupes d’appui : Groupe d’Histoire Sociale7518 et Spartak du 11e