La science et de la recherche dans l’Avenir en commun: propositions
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Dans le cadre de l’élaboration en cours du programme de la France insoumise, une remarque a été faite à propos de la place de la science et de la recherche dans l’Avenir en commun. Il s’agissait d’apporter quelques propositions. Les responsables du groupes ESR de la France insoumise ont accusé réception amicalement. Ci-dessous, le dernier message de ce groupe de travail qui peut être contacté à l’adresse suivante : livret-esr@jlm2017.fr
« Il ne vous a sans doute pas échappé que le livret ESR, dont la parution était initialement prévue pour janvier, n’a toujours pas été rendu public. (…) D’ores et déjà, nous avons pu présenter une partie de nos mesures, en sus de celles déjà présentes dans L’Avenir en Commun. En effet, nous avons pu répondre à un questionnaire sur notre programme ESR envoyé par l’association des journalistes de la presse scientifique (cf. PJ, ou lien ICI; nous sommes les seuls à avoir répondu à ce jour.(…). L’un de nous a également participé à une table ronde sur l’enseignement supérieur organisée par un think tank privé à Dauphine sous la parrainage de Microsoft et du MEDEF, où c’est peu dire que nous avons eu le monopole de la discordance. La vidéo est ICI. Seuls MM. Mélenchon et Fillon étaient représentés, les autres candidats de gouvernement ayant, de l’aveu même de l’animateur, renoncé à participer faute de disposer d’un programme sur ces questions. N’hésitez pas à prendre connaissance de ces documents, et pourquoi pas à les discuter et à en diffuser le contenu, dans la mesure où il est déjà public. Dans les semaines à venir nous continuerons ce travail de réponse aux interpellations des différents acteurs du secteur. (…) »
Sur une « lacune » dans L’Avenir en commun
La science et la culture scientifique sont absentes du programme de la France insoumise, L’Avenir en commun. Sauf erreur de ma part, « la recherche » n’est citée que comme une annexe de l’enseignement supérieur, à la page 112, de la manière la plus imprécise.
Ce qui me paraît manquer dans L’Avenir en commun, c’est le rappel de la valeur essentielle de la science sans laquelle aucun progrès humain n’aurait été et ne sera possible, et de la place essentielle de la culture scientifique dans la culture générale de tous, hommes et femmes, pour comprendre le monde et se l’approprier.
La science est aujourd’hui réduite à être une simple marchandise, comme les autres, ses résultats étant de plus en plus soumis à l’appropriation privée alors qu’il s’agit d’un « bien commun » particulièrement indispensable à tous, et elle est dans le même temps dénigrée ou dévalorisée au nom de conceptions irrationnelles et dévoyées répandues massivement par les médias et accueillies avec facilité par une partie importante du public, en raison, entre autre, des applications néfastes ou dangereuses auxquelles les découvertes scientifiques ont donné lieu et donnent lieu chaque jour.
Alors que la confiance dans la science recule, l’importance de la recherche scientifique est plus que jamais centrale dans tout projet de transformation sociale et de transition écologique réussi.
1) La recherche
Le budget de la recherche scientifique devra être porté à 3% du PNB le plus rapidement possible.
Un ministère de plein exercice, non soumis à la tutelle de l’Enseignement supérieur, sera installé.
Les grands organismes publics de recherches (CNRS, Inserm, Inra, CEA, etc.), garants des recherches d’intérêt général, seront réorganisés, leur gestion soustraite à la logique manageuriale et rendue à des directions démocratisées. L’Agence nationale pour la recherche sera supprimée.
Un organisme public sera chargé de la coordination des recherches et des contrôles sur les effets, positifs ou nuisibles, de la diffusion des résultats de la recherche, en particulier dans l’industrie chimique, dans la métallurgie, dans l’agro-alimentaire, dans le bâtiment et les travaux publics…
Les coopérations européennes et internationales seront favorisées et redynamisées, de nouvelles formes de coopération seront recherchées.
Un relèvement progressif et planifié du nombre de postes de chercheurs dans la recherche publique sera engagé afin de mettre un terme à l’exil des jeunes diplômés et de permettre l’accueil de jeunes chercheurs étrangers dont ceux qui auront fait leurs études en France.
Le crise actuelle du pôle scientifique de Saclay sera surmontée en créant une concertation interministérielle sous l’autorité du Premier ministre.
2) La culture scientifique
La place de la culture scientifique dans la culture générale dispensée dans l’enseignement, du primaire au supérieur, sera augmentée :
L’histoire des sciences et la philosophie des sciences verront leur place rétablie et/ou augmentée dans les programme d’histoire et de philosophie ; ces enseignements seront rétablis ou confirmés dans les classes de Terminale scientifique et dans l’Enseignement technique et professionnel,
L’enseignement des mathématiques, rendu plus concret et plus pratique, sera consolidé, le rôle des mathématiques comme instrument de sélection par l’échec sera combattu,
L’enseignement de physique-chimie et de sciences et vie de la terre sera renforcé, en particulier par le retour des horaires supprimés au Collège et le rétablissement des demi-groupes,
Des activités scientifiques inspirées de « La main à la pâte » seront développées dans le Primaire, y compris dans le temps périscolaire, et dans le Secondaire, y compris sous la forme d’activités de clubs,
Des stages en laboratoire seront proposés en classe de Seconde,
La ségrégation sexiste visant les jeunes filles sera combattue, du Secondaire au Supérieur, pour favoriser leur l’accès aux filières scientifiques, en particulier les plus sélectives.
Le service de l’audiovisuel public verra son cahier des charges modifié afin de donner une plus large place à la présentation de la culture scientifique, sous toutes ses formes, dans les programmes, en particulier aux heures de grande écoute, le mercredi, les fins de semaine, les fins d’après-midi et débuts de soirée. La diffusion des conceptions irrationnelles et anti-scientifiques, en particulier dans les programmes dits récréatifs y sera remise en cause de la même manière. Les journaux télévisés devront consacrer un temps déterminé à la présentation de questions de culture scientifique présentes dans l’actualité.
Des conférences de consensus seront organisées afin de traiter les questions scientifiques les plus importantes en raison de leurs implications éthiques et de leurs retombées économiques et sociales. Les débats principaux en seront diffusés par le service de l’audiovisuel public. Le Parlement sera saisi. En cas de besoin le recours au referendum sera possible.
Ce document ne prétend ni à l’exhaustivité ni à la « vérité ». Il veut simplement traduire de le manière la plus positive le sentiment de grave lacune que j’ai ressenti en lisant L’Avenir en commun. Une « valeur » – comme on dit aujourd’hui – essentielle de la vision progressiste et humaniste de l’avenir m’y a semblé absente : la foi dans le progrès des connaissance ; soit qu’elle était rappelée de manière très formelle (à la page 112), soit qu’elle était noyée dans des dispositifs technocratiques qui l’instrumentalisent (p. 70 et suivantes).
Michel Pinault @GHS7518
professeur d’Histoire et Géographie en retraite, chercheur en histoire des sciences et des milieux scientifiques
http://michel-pinault.over-blog.com